La photographie, c’est une de mes passions et depuis très longtemps ! J'ai débuté la photographie au lycée du temps de l'argentique mais c'est aux débuts des années 1990 - dans l'autre siècle donc - que je me suis posé la question de devenir photographe professionnel. A cette époque, j'ai exercé comme correspondant local de presse pour les éditions Glénat et publié comme auteur notamment pour l'IGN.
J’ai longtemps voulu vivre de mes reportages mais finalement, comme en escalade, je préfère dissocier : plaisir et contraintes professionnelles. Si à l'époque ce métier ne payait déjà pas très bien, aujourd'hui c'est une catastrophe et je ne regrette surtout pas d'avoir fait un autre choix professionnel. Courir derrière des mariées, faire les maternités ou se taper les photos de classes, très peu pour moi !
Bref, devenir Pro, c’est pas donné à tout le monde et c’est beaucoup plus difficile qu'il n'y paraît… Je vous propose dans ce long article des extraits de publications sur le sujet. Pourquoi rédiger ce billet ? D'une part pour donner le vrai prix de vente des images et justifier au passages celles de tous mes estimés confrères, d'autre part, pour dissuader certains jeunes rêveurs et aventuriers de la photographie de se lancer dans ce métier ou au contraire, les y pousser mais en parfaite connaissance de cause. Bref voici quelques petits trucs à lire attentivement avant de vous lancer dans le métier de photographe ! Bonne lecture.
J’ai longtemps voulu vivre de mes reportages mais finalement, comme en escalade, je préfère dissocier : plaisir et contraintes professionnelles. Si à l'époque ce métier ne payait déjà pas très bien, aujourd'hui c'est une catastrophe et je ne regrette surtout pas d'avoir fait un autre choix professionnel. Courir derrière des mariées, faire les maternités ou se taper les photos de classes, très peu pour moi !
Bref, devenir Pro, c’est pas donné à tout le monde et c’est beaucoup plus difficile qu'il n'y paraît… Je vous propose dans ce long article des extraits de publications sur le sujet. Pourquoi rédiger ce billet ? D'une part pour donner le vrai prix de vente des images et justifier au passages celles de tous mes estimés confrères, d'autre part, pour dissuader certains jeunes rêveurs et aventuriers de la photographie de se lancer dans ce métier ou au contraire, les y pousser mais en parfaite connaissance de cause. Bref voici quelques petits trucs à lire attentivement avant de vous lancer dans le métier de photographe ! Bonne lecture.
Le 4 septembre 2013, Rue89 publiait le billet d’un designer et photographe intitulé « Toi, jeune photographe, laisse-moi te dire deux ou trois trucs ». Son auteur, Loïc Swiny, expliquait que cette « lettre ouverte aux jeunes photographes de scène » était inspirée « des dérives constatées dans les pratiques et du ras-le-bol prégnant qui commence à sourdre alentour ». Beñat Picabea, également photographe, a répondu à son tour avec le texte ci-dessous, qui n’est « nullement une insulte, mais simplement une réponse » à Loïc Swiny publiée aussi sur Rue89
Staff, techos et musiciens sur la scène du Festival Pour un Autre Monde 77 |
C’est quoi être photographe aujourd’hui ?
A l’heure où la photographie termine sa mutation vers le tout-numérique, où les « process » de captation permettent de ne plus rater un seul cliché, il n’a jamais été aussi facile d’accéder au statut de photographe. Le phénomène a pris une telle ampleur qu’aujourd’hui c’est toute la profession qui se voit remise en question.
Pourtant, IRL (« in real life », dans la vraie vie) ou virtuellement, fleurissent encore les vocations et les cartes de visite, faisant apparaître le sésame « Joe Kevin, photographe » (et son inévitable lien Facebook), se diffusent plus ou moins discrètement.
Ami jeune, même si je comprends que tu as commis ce bête péché d’orgueil pour « choper un max de meufs avec une pure attitude », il va falloir te mettre au boulot fissa sous peine d’être démasqué et de te retrouver avec une vie sociale un peu compliquée.
Mais avant, laisse-moi te faire le topo du champ de mines dans lequel tu viens de sauter à pieds joints. Déjà là, le premier danger c’est… :
Consoeur aux Affolantes |
1 Toi
Equipé de ton reflex d’entrée de gamme, prêt à tout pour une place au soleil tu vas te mettre à shooter n’importe quoi (mariage, kermesse, bar-mitsva, le cul de ta voisine…) gratuitement et ainsi participer à l’évidence d’exclamations telles que : « Quoi ? ! Tu veux être payé en plus ? Non mais je rêve, la photo c’est une passion pas un métier. »
Naïf irresponsable teinté d’arrivisme à peine innocent, tu deviens le fossoyeur de la fosse commune dans laquelle tu finiras bientôt.
Mais bon allez, tu t’es bien fait la main et tu sens qu’il est temps de passer à la vitesse supérieure. Pour se faire respecter des autres, « size does matter » (la taille, ça compte), tu le sais, et toi tu veux un gros 70/200 à 2.8 constant. C’est décidé, tu pars t’acheter…
2 Le matos
Un pack pro coûtant à peu près le prix d’une bagnole, à moins que tu ne sois né avec une cuillère en argent dans la bouche, tous les moyens vont être bons pour aller taper tes proches : anniversaire, Noël, emprunt familial… tout fait ventre pour ton objectif.
Bien sûr, le temps de réunir l’argent et de recevoir ton matériel, ce dernier sera déjà dépassé ; on appelle ça l’obsolescence programmée, c’est très à la mode et ça va pas arranger ton plan d’amortissement.
Très rapidement, grâce à ton réseau virtuel, tu vas tomber sur des gars avec plein de « super projets qui déchirent ». Tes photos, ils les adorent et, ça tombe bien, ils pensent que ton style correspond bien à ce qu’ils font. Ils sont prêts à tout pour se construire une « data base » événementielle un peu correcte, ils sont…
Equipé de ton reflex d’entrée de gamme, prêt à tout pour une place au soleil tu vas te mettre à shooter n’importe quoi (mariage, kermesse, bar-mitsva, le cul de ta voisine…) gratuitement et ainsi participer à l’évidence d’exclamations telles que : « Quoi ? ! Tu veux être payé en plus ? Non mais je rêve, la photo c’est une passion pas un métier. »
Naïf irresponsable teinté d’arrivisme à peine innocent, tu deviens le fossoyeur de la fosse commune dans laquelle tu finiras bientôt.
Mais bon allez, tu t’es bien fait la main et tu sens qu’il est temps de passer à la vitesse supérieure. Pour se faire respecter des autres, « size does matter » (la taille, ça compte), tu le sais, et toi tu veux un gros 70/200 à 2.8 constant. C’est décidé, tu pars t’acheter…
2 Le matos
Un pack pro coûtant à peu près le prix d’une bagnole, à moins que tu ne sois né avec une cuillère en argent dans la bouche, tous les moyens vont être bons pour aller taper tes proches : anniversaire, Noël, emprunt familial… tout fait ventre pour ton objectif.
Bien sûr, le temps de réunir l’argent et de recevoir ton matériel, ce dernier sera déjà dépassé ; on appelle ça l’obsolescence programmée, c’est très à la mode et ça va pas arranger ton plan d’amortissement.
Très rapidement, grâce à ton réseau virtuel, tu vas tomber sur des gars avec plein de « super projets qui déchirent ». Tes photos, ils les adorent et, ça tombe bien, ils pensent que ton style correspond bien à ce qu’ils font. Ils sont prêts à tout pour se construire une « data base » événementielle un peu correcte, ils sont…
Stop les photos. On a notre photographe officiel |
3 Les orgas
OK, au moment où tu les rencontres ils n’ont pas une thune, faudra faire sans ; mais c’est pas grave ce sera bon pour ton book. Fais gaffe, ces orgas vont grandir, évoluer et réviser leurs exigences à la hausse ; un jour tu te pointeras pour couvrir un de leurs événements et tu tomberas sur une attachée de presse fraîchement nommée qui te signifiera que « ici, c’est devenu un grand festival, y a des règles et vous êtes devenus trop nombreux, alors booon voilà quoiii ». En décodé : « Ecoute, on a trouvé un gars qui a mieux compris que toi l’exercice de la servilité volontaire, alors sans rancune et merci pour le matos »… Oui, c’est très désagréable.
Pour éviter les déconvenues, tu vas t’inscrire à l’AGESSA (Sécurité sociale des auteurs), l’APP… devenir correspondant d’agence. L’objectif ? Devenir officiellement « journaliste reporter d’images ». Ça y est Kevin, t’as ta carte de presse, tu paies des charges, t’es passé pro et… tu gagnes toujours pas un kopeck. Tiens bon, une autre opportunité t’attend : « Y a de quoi te défrayer mais pas plus » et « c’est une belle affiche » et puis « si ça t’intéresse pas, d’autres seront contents de le faire »… Mais d’abord faut signer des papiers, c’est…
4 Le cadre légal
Bah oui, tout ça c’est du business encadré alors prépare-toi à signer tout et n’importe quoi. Restrictions de présence, de captation, de diffusion, d’utilisation, entrée payante… la grande foire.
Le droit à l’image règne en maître là où tu n’es que le larbin volontaire d’une industrie ne te laissant exister que parce qu’elle le veut bien. En gros, tu es souverain sur tes captations et libre de les diffuser où, quand, comment et à qui tu veux. Allez, signe, tu vas rencontrer…
5 Le personnel d’encadrement
OK, au moment où tu les rencontres ils n’ont pas une thune, faudra faire sans ; mais c’est pas grave ce sera bon pour ton book. Fais gaffe, ces orgas vont grandir, évoluer et réviser leurs exigences à la hausse ; un jour tu te pointeras pour couvrir un de leurs événements et tu tomberas sur une attachée de presse fraîchement nommée qui te signifiera que « ici, c’est devenu un grand festival, y a des règles et vous êtes devenus trop nombreux, alors booon voilà quoiii ». En décodé : « Ecoute, on a trouvé un gars qui a mieux compris que toi l’exercice de la servilité volontaire, alors sans rancune et merci pour le matos »… Oui, c’est très désagréable.
Pour éviter les déconvenues, tu vas t’inscrire à l’AGESSA (Sécurité sociale des auteurs), l’APP… devenir correspondant d’agence. L’objectif ? Devenir officiellement « journaliste reporter d’images ». Ça y est Kevin, t’as ta carte de presse, tu paies des charges, t’es passé pro et… tu gagnes toujours pas un kopeck. Tiens bon, une autre opportunité t’attend : « Y a de quoi te défrayer mais pas plus » et « c’est une belle affiche » et puis « si ça t’intéresse pas, d’autres seront contents de le faire »… Mais d’abord faut signer des papiers, c’est…
4 Le cadre légal
Bah oui, tout ça c’est du business encadré alors prépare-toi à signer tout et n’importe quoi. Restrictions de présence, de captation, de diffusion, d’utilisation, entrée payante… la grande foire.
Le droit à l’image règne en maître là où tu n’es que le larbin volontaire d’une industrie ne te laissant exister que parce qu’elle le veut bien. En gros, tu es souverain sur tes captations et libre de les diffuser où, quand, comment et à qui tu veux. Allez, signe, tu vas rencontrer…
5 Le personnel d’encadrement
Gentils gardes barrières Festival PAM 77 |
Soldats acquis à la cause, bien dressés et dotés du pouvoir d’autoriser l’accès à la scène, ils sont aux ordres : « Trois chansons sans flash » et ils te feront illico dégager à la fin du temps imparti sans même constater que dans le public une douzaine de personnes équipées du même matériel que toi est prête à canarder l’intégralité du concert (sans parler des téléphones portables). C’est vrai qu’il y a aussi…
6 Le public
Prêt à témoigner tout son amour à l’artiste, le public est chaud et bouillant mais surtout il a payé sa place et, pour bien te rappeler que par rapport à lui tu n’es rien, il n’hésitera pas à t’invectiver copieusement ou à te bousculer un peu à base de « oh dégage, on voit rien là ! »
Lui dire que tu vas disparaître dans trois chansons, que la scène est suffisamment surélevée pour ne gêner personne n’y fera rien ; il a payé, pas toi et ça c’est lui qui s’en charge. Le set se met en place, va saluer….
7 Les collègues
Cage remplie de bêtes féroces, voilà la fosse. Excités à l’avance par le festin à venir, les jeunes se reconnaissent à leur attitude fébrile ; malhabiles et jetant des regards furtifs à la recherche du spot qui leur permettra d’arracher la meilleure pièce de la bête.
Ils ignorent que dans un carnage tous les morceaux de barbaque se ressemblent. Les anciens le savent, acteurs et témoins de nombreux autres débordements ils attendent patiemment que sonne l’heure de la bouffe et, lorsque le buffet sera ouvert, n’hésiteront pas à attaquer les plus jeunes pour obtenir les lambeaux de choix que leur aînesse permet de réclamer. Blinde-toi, voilà…
6 Le public
Prêt à témoigner tout son amour à l’artiste, le public est chaud et bouillant mais surtout il a payé sa place et, pour bien te rappeler que par rapport à lui tu n’es rien, il n’hésitera pas à t’invectiver copieusement ou à te bousculer un peu à base de « oh dégage, on voit rien là ! »
Lui dire que tu vas disparaître dans trois chansons, que la scène est suffisamment surélevée pour ne gêner personne n’y fera rien ; il a payé, pas toi et ça c’est lui qui s’en charge. Le set se met en place, va saluer….
7 Les collègues
Cage remplie de bêtes féroces, voilà la fosse. Excités à l’avance par le festin à venir, les jeunes se reconnaissent à leur attitude fébrile ; malhabiles et jetant des regards furtifs à la recherche du spot qui leur permettra d’arracher la meilleure pièce de la bête.
Ils ignorent que dans un carnage tous les morceaux de barbaque se ressemblent. Les anciens le savent, acteurs et témoins de nombreux autres débordements ils attendent patiemment que sonne l’heure de la bouffe et, lorsque le buffet sera ouvert, n’hésiteront pas à attaquer les plus jeunes pour obtenir les lambeaux de choix que leur aînesse permet de réclamer. Blinde-toi, voilà…
1er constest d'escalade Red Bull en Forêt de Fontainebleau |
8 Les artistes
Singularité troublante, ils sont généralement les personnes les plus amicales de ce grand barnum hystérique. Il t’arrivera même de tomber sur « le bon client » qui n’hésitera pas à prendre la pose ad hoc tout en te gratifiant d’un clin d’œil à la fin de l’exercice et à l’instant de cet unique moment de reconnaissance tu te diras que finalement « tout ça vaut quand même le coup ». Dérushe tout ça fissa et passe à…
9 La diffusion
Oublie d’entrée la presse locale, les anciens trustent la place depuis des années et même si tu disposais d’un contact te permettant une diffusion tu y serais crédité « DR » (droits réservés), mention habile garantissant que tu ne toucheras aucun droit d’auteur. C’est injuste, illégal ?
On n’a pas le temps ; vois ton avocat et intente une action, de toute façon ta photo elle valait quoi, dix balles ? Oublie aussi les mensuels nationaux. A cause du Web, le marché tire la gueule, du coup une grande majorité ne bosse plus qu’avec les boîtes de prod’ et à grands coups de photos studio. Reste les webzines, bien pointus, bien engagés, toujours OK pour une diffusion créditée… mais gracieuse.
Après, avec un peu de pognon et de bonnes photos qui arrivent à plaire à de potentiels acheteurs, tu peux toujours… éditer et diffuser ton matos à compte d’auteur et rembourser tes frais de tirage. Tire pas cette gueule, c’est déjà pas mal.
Moi, le vieux photographe (ou photographe à l’ancienne), laisse-moi te répondre deux ou trois trucs.
Oui, la photographie est passée au numérique. De ce fait, l’accès à l’image a été facilité. Mais ne reconnaît-on pas un photographe à son talent, à « sa patte », à son émotion ?
Penses-tu sérieusement, monsieur LE professionnel de la photo, que le numérique a transformé les personnes talentueuses en amateurs ? Doit-on obligatoirement suivre une école de photographie de renom pour être photographe ?
J’ai entendu dire un jour qu’il n’existait pas de photographe amateur, ni de photographe professionnel. J’ai entendu dire qu’il n’y avait que de bons ou de mauvais photographes.
La technique en photographie est certes utile, mais si l’on ne met pas de cœur dans ses images, autant laisser le cache sur l’objectif au moment de déclencher.
Moi aussi je fais de la photo de scène
J’ai débuté par la photographie classique (devenue « argentique » depuis le numérique), mais ta lettre ouverte m’a quelque peu interpelé.
Effectivement, je fais de la photo de scène (beaucoup de concerts) parce que j’aime la photo depuis toujours, parce que j’aime la musique depuis toujours, parce que j’aime l’artistique depuis toujours.
Effectivement, il me faut le 70-200mm à 2.8. Avec le temps, on progresse et l’on se rend compte que ce n’est pas seulement le boîtier qui permet de réussir une image, mais que c’est l’objectif qui aide à réaliser de bons clichés. Généralement, je travaille tout de même au 50mm 1.4. Comme quoi, je sais aussi m’adapter.
Personnellement, je me fiche de n’avoir le droit de ne faire que trois chansons. Parce que je ne fais pas de la photo de scène, de concert ou de chansons en réalité, mais des photos d’humains, de visages, d’expression, de chaleur et d’ambiance, et que l’argent m’importe peu. J’ai toujours la passion.
Ne crois pas que toutes les personnes que tu croises et qui te bousculent derrière les « crash barrières », Ô grand photographe, ne connaissent rien à la photo.
Les Fatals Picards aux Affolantes 2017 de Melun |
Je suis un « bâtard » de l’image.
De mon côté, je pense souvent que l’ancienne génération de photographes, celle qui parle encore de pellicule, de révélateur, de bain ou bien de négatifs, a peur de la nouvelle génération. Celle qui parle de fichier .jpeg ou .raw, de carte mémoire ou encore de pixels.
Toi qui a peur que l’on prenne TA place (au soleil), je tiens à te rassurer. Même avec le numérique, pour percer en photographie, il faut du talent. Et ce plus qu’hier. La concurrence est rude ! Mais dans ta lettre, tu as su nous l’expliquer.
Certes, dans cette lettre ouverte, tu parlais un peu de moi. Mais je fais partie de ces « bâtards » de l’image. Ni enfant de l’argentique, ni du numérique. Le cul entre deux chaises finalement.
Je suis ce jeune photographe, oui ! Pourtant, je ne cherche pas à être reconnu mais plutôt à ce que mon travail le soit.
Bien à toi,
Beñat Picabea
Conflit de génération ?
Non, c'est au-delà de ça. Chaque jour des milliers de photographes ou apprentis photographes s'engagent sur la scène pour vendre leurs images. Pour un peu de notoriété et gagner 3 francs 6 sous dans un contexte hyper concurrentiel, certains vendraient certainement père et mère. Cette dégradation du marché ne fait que s'accentuer depuis des décennies. On ne compte plus les articles sur le sujet de la très mauvaise rémunération des reporters d'images et sur la nécessité de réglementer un peu la profession. Et je ne vous parle même pas des stocks d'images vendus quelques centimes sur le web ou des pseudos agences de mise en relation des photographes avec les clients pour des bouchées de pains ! Aujourd'hui, quand un photographe un tant soit peu professionnel réclame plus de 1200 € pour une journée de shooting (un mariage par exemple), bon nombre de clients hurle face au devis ! Et pourtant, c'est à peine rentable…
Vous trouvez ça cher !?
D’après les statistiques, le revenu moyen pour un photographe représente 30% de son chiffre d’affaire HT. Ainsi, pour une recette de 1200€ TTC (soit 1 000€ HT) il reste à peine300€ pour le photographe une fois déduits toutes les charges professionnelles et cotisations sociales. Et si on ramène ça au taux horaire...Aïe ! Pour une journée de prise de vue, il y a au minimum une seconde journée de post production (sélection des images, retouches, création du book, impression...).
En 2015, le Ministère de la Culture et de la Communication a publié un rapport passionnant sur l’état de la photographie professionnelle en France après avoir interrogé plus de 3000 photographes professionnels sur environ 25 000 photographes pros en France. Voici quelques chiffres clés.
Les photographes pros sont mal payés. 43 % des photographes enquêtés ont perçu moins de 15 000 € nets d’activité en 2013 et seulement 24 %, plus de 30 000 € (souvent les plus âgés expérimentés et connus). Seuls 59% des photographes ont tiré l’intégralité de leur revenu d’activité de la photographie. 89 % des photographes enquêtés sont artistes auteurs, 10 % sont salariés de la presse, 7 % sont auto-entrepreneurs, 4 % artisans. Cette statistique est très surprenante car normalement un artiste auteur n'a légalement pas le droit de vendre de prestation photographique (mariage…) à une entreprise (reportage "corporate") ! Entre 1995 et 2012 le nombre de photographes pros a augmenté de 37% !
Les tarifs d’un bon photographe peuvent varier en fonction de différents paramètres et notamment du choix de son statut juridique (auto-entreprise vs EI, SAS, EURL etc… redevance ou non de la TVA, charges RSI…) ! Du coup, c'est pas toujours facile de comparer les prix. Le marché propose des photographes de qualité aux alentours de 1500€ et 2000€ pour une journée complète (hors options éventuelles). En dessous de 1000€ la journée, de mauvaises surprises peuvent arriver !
Si un reportage de type mariage ne représente qu’environ 15h sur place le jour J, il représente pour le photographe de nombreuses heures avant et après le mariage (rencontres avec les mariés, repérages sur place, matériel, tris, retouches, livraison des photos…). En tout, comptez une bonne quarantaine d'heure de travail ! Pour la couverture complète d'un évènement sportif ou d'un concert, c'est exactement la même chose. Songez par exemple que certaines compétition d'escalade se tiennent se 2 jours. Assurer des photographies des ouvertures des blocs, des qualifications, des demi-finales, finales et podium, vous voyez un peu le temps de travail que cela représente !?
La réalité du métier d'un photographe graphique réalisé par la International Society of Professional Wedding Photographers |
Donc, voici quelques élément de calcul pour comprendre les revenu d'un photographe auto-entrepreneur sur un devis shooting mariage à 1200 € TCC
Le déplacement + le matériel + les disques pour la sauvegarde + les services pour la galerie privée + les assurances + … 100€
Achat du livre photo 200€
Les divers Taxes soit 240,00€ (20%)
Il reste donc 1200€ – (100€ + 200€ + 240€) = 660€ pour disons 40h de travail soit pour 11,25€/h (Le SMIC est à 9,43€). Et encore, on parle là d'une rémunération brute à laquelle il faut retirer les charges sociales (vacances, retraites, assurances santé…) et les charges de matériel (usure du matériel photographique, de la voiture…)
Donc que font les « photographes » qui proposent un tarif à 400€ ! Même en admettant qu’ils ne passent que 20h de travail sur le shooting et qu’il ne proposent que 50 tirages photo, une fois les frais enlevés, il restera moins de 6,88€/h brute hors charges … donc seulement 73% du SMIC horaire Donc en fin de compte être payé 400€ pour un shooting revient à accepter un salaire environ à 55% du SMIC. En gros voici ce que cela donne…
Pour aller encore plus loin, voici quelques liens utiles.
Vous pouvez commencer par lire l'enquête citée plus haut réalisée par Claude Vauclare et Rémi Debeauvais
Le blog Deviens photographe vous sera sans doute très utile et a consacré de longs articles sur le sujets dont certains calcules présentés plus haut sont directement issus ! Commencez par celui-ci et ne manquez pas celui-là
Après, certains photographes gagnent bien leur vie. Par exemple Eric Kim et ses 200 000 $ par an ! Sinon, je vous conseille plutôt le métier d'influenceur blogueur, c'est visiblement mieux payé si l'on en croit ce business model
Le tableau ne serait pas complet sans une visite au site de l'UPP, le blog de la meilleure avocate des photographes, Joëlle Verbrugge et celui de Fozen Piglet, un photographe journaliste qui dit tout haut ce que beaucoup n'osent même pas écrire !
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